Source: Les Echos
L’A380 reste la vitrine commerciale des grandes compagnies aériennes, comme Singapore et Emirates. Mais le carnet de commandes se vide.
Pour le dixième anniversaire de son entrée en service, l’A380 n’aura pas eu à se plaindre. Ses deux principaux clients, Singapore Airlines, qui fut la première à mettre en ligne le super-jumbo d’Airbus le 25 octobre 2007, et Emirates, qui est de loin son plus gros utilisateur, avaient tous deux prévus de quoi fêter dignement l’événement.
La première en dévoilant ce jeudi à Singapour de nouveaux fauteuils et aménagement intérieurs spectaculaires qui équiperont son dernier A380. Et la seconde, en prenant livraison en grande pompe, ce vendredi à Hambourg, de son 100e A380.
Faire mentir les Cassandre
Une façon pour Emirates et Singapore Airlines de faire mentir, au moins temporairement, les Cassandre qui prédisent la fin prochaine du géant du ciel. Si le très gros-porteur d’Airbus peine à trouver de nouveaux clients, il n’en reste pas moins la vitrine commerciale de la première compagnie long-courrier qu’est devenue Emirates et de la compagnie la plus réputée pour sa qualité de service qu’est SIA. Il est aussi l’avion le plus populaire auprès du grand public.
« Nous avons commandé 5 nouveaux A380 pour remplacer nos 5 premiers et nous allons investir 850 millions de dollars pour installer nos nouvelles cabines sur nos 19 A380, ce qui démontre notre attachement à cet avion. Mais nous n’irons pas au-delà de 19 A380, explique le PDG de Singapore Airlines, Goh Choon Phong. L’A380 est un gros avion, qui doit être réservé aux lignes sur lesquelles les créneaux horaires sont contraints. »
Emirates et SIA ne sont pas les seuls à continuer de miser sur l’A380. Etihad, Qatar Airways ont également lourdement investi pour en faire leur porte-étendard. Air France a également confirmé récemment sa décision de rénover les cabines d’au-moins une partie de ses 10 A380 à l’horizon 2020.
Aucune commande depuis plus d’un an
Et pourtant, l’avenir de l’A380 n’a jamais semblé aussi incertain. Depuis 2014, les annulations sont en effet plus nombreuses que les prises de commandes. La dernière commande de deux appareils pour Emirates remonte à avril 2016. Et tous les efforts d’Airbus pour trouver de nouveaux clients sont restés vains. Présenté en juin dernier, l’A380+, une version moins gourmande en carburant et pouvant accueillir jusqu’à 80 passagers supplémentaires, n’a pas encore preneur.
De même, le partenariat noué en 2015 avec le loueur d’avion américain Amedeo, pour rendre l’A380 accessible à des compagnies plus modestes, n’a pas non plus porté ses fruits. Quant au projet d’A380 neo, doté de nouveaux moteurs Rolls-Royce, Airbus n’a trouvé aucun autre client potentiel qu’Emirates. Son lancement a donc été reporté sine die.
Réduire la production
En attendant d’hypothétiques commandes iraniennes ou chinoises, Airbus a dû se résoudre à réduire la production, pour ne pas vider trop vite son carnet de commandes, passé le mois dernier sous la barre des 100 appareils. De 2,5 exemplaires par mois début 2017, la cadence de la chaîne d’assemblage de Toulouse tombera à un appareil par mois en 2018, alors qu’elle pourrait en produire quatre par mois.
De quoi tenir en attendant les contrats, mais avec la forte probabilité de recommencer à perdre de l’argent, sachant que le point d’équilibre financier du programme se situerait à 25 appareils par an. Au total, l’A380 n’aura donc été rentable que trois ans, de 2015 à 2017.
Bruno Trévidic