Starship de SpaceX

Source Le Monde

Le Starship, la mégafusée de SpaceX, explose en vol après son premier décollage

L’engin, conçu par la société d’Elon Musk, est le plus gros vaisseau habitable jamais lancé

Pierre Barthélémy

De multiples fois repoussé depuis l’été 2022, l’événement que tous les fans du spatial attendaient a enfin eu lieu : jeudi 20 avril, le Starship, la mégafusée de SpaceX, a décollé de la base de Boca Chica (Texas), pour son premier vol orbital. Posé sur une sorte de table de décollage, le lanceur de 120 mètres de haut a quitté le sol peu après 15 h 30.

Néanmoins, l’enthousiasme des employés de SpaceX, qui criaient de joie et applaudissaient lors de la retransmission du lancement, a été vite douché. Trois minutes après le décollage, la fusée a explosé en vol et ses débris sont retombés dans le golfe du Mexique. Lundi 17 avril, une première tentative avait été annulée un quart d’heure avant l’heure pour un problème de pressurisation.

La fusée conçue par la société d’Elon Musk, la plus puissante de l’histoire, est en deux parties : un premier étage, nommé « Super Heavy », équipé de trente-trois moteurs Raptor fonctionnant simultanément (du jamais vu) et un second élément de 50 mètres, appelé lui-même « Starship » et doté d’ailerons. Celui-ci est censé, à terme, transporter du fret ou des passagers, ce qui en ferait le plus gros vaisseau spatial habitable jamais conçu.

Lors de la tentative du 20 avril, les moteurs du Super Heavy (dont certains n’apparaissaient pas allumés sur les images vues du sol) auraient dû s’éteindre moins de trois minutes après le décollage. Aussitôt après, le Starship aurait dû se séparer du premier étage et mettre en marche ses six moteurs pour atteindre l’espace.

La séparation n’a pas eu lieu

Rien de tout cela ne s’est produit. Au contraire, les moteurs du Super Heavy semblaient continuer à fonctionner et la séparation n’a jamais eu lieu. La fusée est partie en toupie avant d’exploser, sans que l’on sache si cette explosion est due à la dislocation du lanceur ou bien au système d’autodestruction qui l’équipe.

Si tout s’était bien passé, le Super Heavy serait retombé dans le golfe du Mexique tandis que le Starship aurait continué son ascension. Il aurait ensuite effectué un quasi-tour de Terre avant de choir à son tour dans l’océan Pacifique, non loin de Hawaï, au terme d’une heure et demie de voyage. Ce premier vol avait en effet aussi pour objectif de tester le bouclier thermique qui équipe le Starship pour l’empêcher de se consumer lors de la rentrée atmosphérique.

De l’aveu de SpaceX, réussir la mission dans son intégralité aurait tenu de l’exploit. Début mars, Elon Musk lui-même avait reconnu, à l’occasion d’une conférence, qu’il n’y avait qu’une chance sur deux pour que le Starship atteigne l’espace.

Cependant, la société américaine a pour philosophie de tenter le coup malgré les risques et d’apprendre de ses échecs. Une démarche appliquée lors de la mise au point de la fusée réutilisable Falcon-9 qui est aujourd’hui le lanceur numéro un du spatial mondial. Depuis le début de l’année, elle a totalisé vingt-quatre tirs, tous réussis, soit un décollage tous les quatre jours et demi.

Les commentateurs de SpaceX, lors de la retransmission du 20 avril, ont d’ailleurs prudemment répété que le test avait surtout pour but « de recueillir des données et de libérer le pas de tir pour se préparer à décoller de nouveau », selon les mots de l’ingénieur John Insprucker. La crainte principale était que le Starship explose lors de la mise à feu de ses moteurs, ce qui aurait provoqué la destruction du pas de tir et de l’immense tour de lancement de près de 150 mètres de haut qui l’équipe. Et aussi considérablement retardé la mise au point du Starship.

Dans un tweet publié peu après le vol avorté, Elon Musk a félicité l’équipe de SpaceX et ajouté un laconique « beaucoup a été appris en vue du prochain vol d’essai dans quelques mois ». Son entreprise dispose déjà de quelques exemplaires du Super Heavy et du Starship et d’autres sont en cours de fabrication. L’idée de SpaceX consiste à enchaîner les essais jusqu’à ce que cela fonctionne.

Il faut dire que le temps presse. C’est en effet une variante du Starship, le Human Landing System (HLS), que devront emprunter les astronautes américains pour se poser sur la Lune à l’occasion de la mission Artemis-3. Or celle-ci est programmée pour la fin 2025, ce qui paraît très optimiste. Voire irréalisable si l’on songe que, dans la trentaine de mois qui restent, SpaceX devra faire la preuve de la fiabilité de …

Un podcast sur https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-science-cqfd/starship-crash-test-reussi-7397754?

Source: Les Echos