Air France et Airbus

Source: Le Monde du 12/10/2023

Le groupe affirme une préférence marquée pour Airbus

G. D.

Paradoxalement, il aura fallu l’arrivée d’un Canadien, Ben Smith, à la tête d’Air France-KLM pour que la compagnie se décide à acheter majoritairement franco-européen plutôt qu’américain. Et ainsi affirmer une préférence pour Airbus plutôt que Boeing. Dernier épisode en date, fin septembre, la compagnie a annoncé qu’elle passait commande de 50 long-courriers A350. Un contrat évalué à 17,5 milliards d’euros au prix catalogue qui pourrait même s’enrichir de 14 milliards supplémentaires car le groupe s’est aussi engagé pour 40 gros-porteurs en option. Ces avions seront répartis entre Air France et KLM à raison de « 28 pour la première et 22 pour la seconde », affirme Philippe Evain, ancien président du Syndicat des pilotes de ligne.

En pratique, c’est avec l’A220 qu’Air France a commencé de pencher vers Airbus au détriment de Boeing. Pour remplacer les A318 et A319 vieillissants de la flotte, Ben Smith a préféré le petit A220. Un choix du cœur pour certains, car l’avion, conçu à l’origine par le constructeur canadien Bombardier avant d’être racheté par Airbus est produit au Québec.

C’est aussi un choix de raison, car il vient aider Air France qui a pour « enjeu de réduire son empreinte environnementale », explique Anne Rigail, directrice générale de la compagnie. Pourtant commercialisé depuis 2008, l’A220 n’est cependant pas l’appareil le plus moderne. En revanche, avec l’A350, Air France fait de réelles économies puisque l’avion a, selon la directrice générale, « un coût d’exploitation très compétitif et une consommation de carburant réduite de 25 % ».

Une commande ferme de cent appareils

Fin 2021 l’inclinaison d’Air France-KLM pour Airbus s’est encore affirmée. En décembre de cette année-là, la direction de la compagnie franco-néerlandaise a annoncé son intention de remplacer tous les Boeing 737 de ses filiales à bas coûts Transavia France et Transavia Hollande et ceux de KLM par des Airbus A320neo et A321neo. Au total, le groupe a passé une commande ferme de cent appareils avec une option pour soixante avions supplémentaires. Un contrat évalué entre 9 milliards et 12 milliards d’euros.

Officiellement, Air France-KLM a fait son choix au mieux de ses intérêts stratégiques et économiques. En coulisses, on laisse entendre qu’il aurait été compliqué pour Air France comme pour KLM d’acheter des avions américains après avoir été tout juste sauvées de la faillite grâce à l’argent des contribuables français et néerlandais. En effet, la compagnie française a reçu une aide financière de 7 milliards d’euros tandis que KLM a bénéficié d’un apport financier de 3,4 milliards d’euros.

La préférence pour Airbus devrait être pérenne. L’avionneur et la compagnie sont convenus de lancer une co-entreprise de maintenance début 2024. Elle sera chargée de la maintenance des A350 qui vont entrer progressivement dans la flotte de la compagnie. Avec cette joint-venture, Airbus consacre le succès commercial de son jumbo dont 550 exemplaires sont déjà en service et plus de 1 000 autres dans ses carnets de commandes. L’avionneur va notamment bénéficier du réseau international de maintenance d’Air France, numéro deux mondial du secteur. La compagnie aérienne va, elle, pouvoir tabler sur le savoir-faire d’Airbus principalement dans la gestion des données et en maintenance prédictive. Une nouvelle technologie qui permet de prévoir l’usure des pièces, d’anticiper les pannes et donc de disposer à l’avance des pièces de rechange sur les destinations desservies par les avions. Un double gain de temps et d’argent pour les compagnies clientes.