Les salariés d’Air France en grève contre leur départ de l’aéroport d’Orly
L’intersyndicale craint une baisse d’activité et des suppressions de postes à Orly et dans des escales de province
Guy Dutheil. Le Monde
Les syndicats ne décolèrent toujours pas contre la décision d’Air France, annoncée mi-octobre, de quitter l’aéroport d’Orly pour regrouper toutes ses activités à Roissy-Charles-de-Gaulle. D’ici à deux ans, au plus tard, le groupe ne sera plus représenté à Orly que par sa filiale à bas coûts Transavia.
L’intersyndicale, qui rassemble toutes les organisations de la compagnie aérienne, à l’exception des deux principaux syndicats de pilotes, le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) et le Syndicat des pilotes d’Air France, a déposé un préavis de grève pour le jeudi 14 décembre. Les syndicats appellent, le même jour, les salariés de la compagnie à une manifestation, à 10 heures, devant l’aérogare 3 d’Orly. Dans un communiqué, mardi 12 décembre, la compagnie annonce qu’elle « maintient l’ensemble de son programme de vols pour cette journée ».
Le futur déménagement vers Roissy fait craindre une baisse d’activité et des suppressions de postes à Orly, mais aussi dans les escales de province à Nice, Marseille et Toulouse. Quelque 600 employés de la compagnie devraient faire leurs bagages pour Roissy, estiment les syndicats. La direction a chiffré à, respectivement, 430 et 170 le nombre de membres du personnel au sol et de la maintenance qui devront rejoindre la plate-forme de Charles-de-Gaulle. Un départ annoncé, contesté par les syndicats, qui souhaiteraient que les personnels soient maintenus à Orly pour s’occuper des avions et des activités de Transavia.
Outre les transferts vers Roissy, près de 150 emplois seraient menacés en région. Des réductions d’effectifs qui font redouter, selon les syndicats, une baisse d’activité. Notamment en ce qui concerne la navette, ce train du ciel qui relie, plusieurs fois par jour, Orly et Roissy à Nice, Toulouse ou Marseille. Ainsi, quand la compagnie effectue cinq allers-retours quotidiens vers Marseille depuis Roissy, elle en exploite sept, chaque jour, depuis Orly. « Demain, une fois regroupée à Roissy, Air France va-t-elle conserver les douze rotations quotidiennes vers Marseille ou diminuer l’activité ? », s’interrogeait déjà la CGT à la mi-octobre.
« Trop de mal »
Dans ce contexte social inflammable, l’annonce de la nomination prochaine de Florence Parly au conseil d’administration d’Air France-KLM, irrite les salariés. Partie il y a neuf ans de la compagnie aérienne, l’ex-ministre des armées y fait son retour après avoir été cooptée pour succéder à Isabelle Parize comme administratrice du groupe Air France-KLM. Une première étape avant que Mme Parly prenne « la succession d’Anne-Marie Couderc en qualité de présidente du conseil d’administration, au plus tard à l’issue de l’assemblée générale 2025 statuant sur les comptes de l’année 2024 », a indiqué la compagnie aérienne.
Ce n’est pas, semble-t-il, la première tentative de l’ancienne ministre pour revenir chez Air France ces dernières années. Un retour impossible sauf à risquer le conflit d’intérêts en raison de la situation familiale de Mme Parly, dont le mari, Martin Vial, occupait jusqu’à son départ en juin 2022, la présidence l’Agence des participations de l’Etat (APE). L’APE qui, justement, avait grandement participé à la recapitalisation du groupe Air France au bord de la faillite à cause de la pandémie de Covid-19.
« Nous sommes un petit peu choqués par la nomination de Florence Parly, euphémise Laurent Dahyot, secrétaire général de la CGT Air France. Elle a fait trop de mal en termes d’emplois notamment en contribuant au désengagement d’Air France du court-courrier et du fret. ». En effet, Mme Parly a dirigé la branche fret entre 2008 et 2011. Sous sa houlette, la flotte d’avions-cargos est passée de 26 appareils à 11. Une initiative malheureuse, car quelques années plus tard, l’essor de l’e-commerce a relancé l’activité cargo dans les compagnies du monde entier.
Les pilotes n’ont pas oublié, non plus, les passages de Mme Parly aux commandes de l’activité court-courrier qu’elle avait commencé de restructurer jusqu’à son départ en 2014. « Avant elle, Air France était numéro un mondial du cargo. Après elle plus rien du tout », se désole Philippe Evain, ancien président du SNPL. Un autre navigant fait déjà savoir que les pilotes « seront très vigilants pour que Mme Parly ne prenne pas de fonctions opérationnelles ».