Source: Le Monde
Airbus enregistre un record historique de commandes
Comme son rival américain Boeing, l’avionneur européen doit désormais conjuguer remontée des cadences de production et qualité
Guy Dutheil
Les années se suivent et se ressemblent pour le plus grand bonheur d’Airbus. Une nouvelle fois, le leader mondial de l’aéronautique a accumulé des records. Après un pic des bénéfices en 2022, ce sont les commandes qui, à leur tour, ont atteint des sommets. A l’occasion de la présentation de ses résultats financiers annuels, jeudi 15 février, l’avionneur européen s’est réjoui d’avoir enregistré 2 094 commandes nettes en 2023. Un record historique.
En 2022, le carnet de commandes ne s’était gonflé « que » de 820 avions supplémentaires. La vigueur d’Airbus se reflète dans son chiffre d’affaires qui s’est établi, en 2023, à 65,44 milliards d’euros. En hausse de 11 % par rapport à 2022, quand il atteignait alors 58,76 milliards d’euros. Toutefois, cette envolée du nombre des commandes ne se traduit pas dans le bénéfice net qui baisse de 11 %, à 3,78 milliards d’euros contre 4,24 milliards d’euros en 2022. Une légère contre-performance liée aux difficultés de la division espace qui ont conduit à passer une provision de 600 millions d’euros.
Ce coup de frein sur le résultat net est aussi la conséquence de la remontée en cadence contrariée d’Airbus. En 2023, le groupe présidé par Guillaume Faury n’a livré que 735 appareils. Même s’il a dépassé ses prévisions de 720 avions, l’avionneur n’a toujours pas retrouvé ses scores d’avant la crise du Covid-19. En effet, en 2019, il avait livré 863 avions à ses compagnies clientes. Les effets de la crise ne vont pas s’effacer de sitôt. Le retour aux bons chiffres d’avant la pandémie ne devrait pas intervenir en 2024. Pour cette année, le groupe ne prévoit pas plus de 800 livraisons.
Chaîne des fournisseurs fragile
« Il s’agit d’un résultat remarquable compte tenu de la complexité opérationnelle » et surtout des tensions sur la chaîne de fournisseurs, s’est toutefois félicité M. Faury. Pendant que l’avionneur européen consolide sa position de numéro un mondial de l’aéronautique, le rival Boeing a terminé dans le rouge pour la cinquième année d’affilée avec une perte de 2,2 milliards de dollars (environ 2 milliards d’euros). L’américain a de nouveau piqué du nez à cause, notamment, de problèmes récurrents de qualité de production. Au début janvier, c’est un Boeing 737 MAX de la compagnie Alaska Airlines qui a ainsi, en plein vol, perdu une porte à laquelle il manquait des boulons de fixation.
Airbus et Boeing seront confrontés au cours des prochaines années à la même problématique : à quel rythme conduire la remontée des cadences de production alors que les carnets de commandes débordent ? L’européen a déjà plusieurs fois prévenu qu’il décalait de un an, de 2025 à 2026, son objectif de sortir de ses chaînes d’assemblage 75 appareils A320 chaque mois contre une cinquantaine aujourd’hui. Airbus ne veut pas augmenter trop vite le tempo au risque qu’un des maillons de la chaîne de ses fournisseurs ne casse. Face aux analystes, jeudi, M. Faury a reconnu que les difficultés rencontrées par certains éléments de sa « supply chain » étaient « un facteur de limitation ».
Afin d’accélérer les cadences, l’avionneur a entamé, en 2023, la construction de deux nouvelles lignes d’assemblage à Tianjin (Chine), et à Mobile, en Alabama, (Etats-Unis). De même, le premier A321neo est sorti, en décembre 2023, de la chaîne d’assemblage inaugurée à Toulouse.
Pour les années à venir, l’avionneur se donne les moyens de livrer au plus vite les 8 598 avions commerciaux de son carnet de commandes évalué à plus de 554 milliards d’euros. Airbus a déjà, au rythme actuel, près de onze années de production garantie. L’objectif est de fournir le plus rapidement possible les avions à ses compagnies clientes, qui doivent patienter en moyenne sept ans. Pour y parvenir et raccourcir les délais, le groupe s’est doté, à Toulouse, d’un tout nouveau centre de livraisons. Baptisé « Terminal D », il a été pensé « pour accompagner la remontée en cadence », fait savoir l’avionneur. Surtout, il a été bâti au « plus près de la ligne d’assemblage ».
« 100 % de carburant durable »
A l’avenir, Airbus et Boeing seront confrontés aux mêmes problématiques, à savoir conjuguer impératifs de production et qualité. Après s’être séparés de nombreux salariés, parfois les plus expérimentés, pendant la crise du Covid-19, les deux avionneurs ont perdu en savoir-faire. Pour faire face au surcroît d’activité, le groupe de Guillaume Faury a recruté. Avec 148 000 salariés fin 2023, ses effectifs sont désormais plus nombreux qu’en 2019, quand Airbus ne comptait que 135 000 collaborateurs.
L’avionneur ne perd pas de vue ses objectifs en matière de protection de l’environnement. Selon le PDG, la nouvelle génération d’avions sera compatible avec « 100 % de carburant durable d’aviation ». De même, il prévoit toujours la survenue de l’avion propulsé « à l’hydrogène en 2035 ».
Voir aussi https://www.aerotime.aero/articles/airbus-results-year-faury-production-order?
Source: Les Echos