Boeing: fin de la grève

Source: Le Monde

Chez Boeing, un accord met fin à sept semaines de grève

Les ouvriers ont obtenu une hausse de leurs salaires. Le débrayage a coûté plus de 10 milliards de dollars à l’avionneur et à ses fournisseurs

Guy Dutheil

Il aura fallu plus de sept semaines de grève pour parvenir à un accord et mettre un terme à un conflit géant par sa durée et son coût. Les 33 000 ouvriers des deux usines historiques de Boeing autour de Seattle (Etat de Washington) ont voté, lundi 4 novembre, en faveur de l’accord proposé par leur organisation, l’IAM District 751, la branche locale du Syndicat des machinistes.

Les grévistes ont obtenu une hausse de 38 % de leurs rémunérations étalée sur quatre ans. Une augmentation très proche des 40 % qu’ils réclamaient depuis le début du conflit ; une revendication exigée sans faiblir pour compenser les effets de l’inflation et calquée sur les revalorisations obtenues par les pilotes de plusieurs grandes compagnies américaines.

En revanche, les grévistes n’ont pas réussi à faire plier la direction de l’avionneur sur le rétablissement de leur système de retraite maison. Il a été remplacé, depuis 2014, par un dispositif de pension par capitalisation bien moins favorable pour les pensionnés et surtout beaucoup plus coûteux pour les cotisants. Pour obtenir le feu vert des salariés, la direction avait dû aussi consentir à une prime annuelle de 12 000 dollars (11 000 euros) et prendre l’engagement de construire son prochain avion dans les deux usines d’Everett et de Renton, dans la banlieue de Seattle.

Le conflit a été très rude pour les salariés, qui ne percevaient que 250 dollars par semaine, certains même recourant aux banques alimentaires. « La grève va prendre fin et il nous appartient maintenant de reprendre le travail et de commencer à construire les avions, d’augmenter les tarifs et de ramener cette entreprise sur la voie de la réussite financière », s’est pourtant félicité Jon Holden, président de l’IAM District 751. Il n’empêche, le vote des salariés sonne tel un désaveu pour le syndicat, qui avait, auparavant, validé deux moutures d’accord rejetées massivement par les grévistes.

« Retrouver l’excellence »

Kelly Ortberg, le président-directeur général de Boeing, nommé en août, s’est dit « heureux » de mettre fin au conflit social. Une sortie de crise qui ne signifie toutefois pas la fin de tous les problèmes auxquels l’avionneur est confronté depuis plusieurs années maintenant. « Il y a beaucoup de travail à accomplir pour retrouver l’excellence qui a fait de Boeing une entreprise emblématique », a-t-il ainsi ajouté.

La grève a coûté plus de 10 milliards de dollars. Un gouffre pour Boeing, dont les finances sont déjà au plus bas. Fin octobre, l’avionneur a présenté sa pire perte semestrielle en quatre ans : 6,17 milliards de dollars. Un trou d’air qui vient s’ajouter à sa dette déjà abyssale qui s’établit à 58 milliards de dollars. A la mi-octobre, la direction a annoncé la levée de 25 milliards de dollars sur les marchés auxquels viendra s’ajouter une ligne de crédit supplémentaire de 10 milliards de dollars.

Ebranlé côté finances, Boeing est aussi au plus mal sur le plan industriel. Les semaines de grève ont mis à l’arrêt ses usines desquelles sortent ses avions les plus vendus : le moyen-courrier 737 MAX et le long-courrier 777 notamment. Surtout, le conflit a encore retardé le retour de Boeing aux cadences de production qui lui permettront de livrer tous ses clients. Faute de pouvoir disposer de leurs appareils, les compagnies aériennes clientes de Boeing doivent revoir leur croissance à la baisse.

C’est notamment le cas de Ryanair, qui a annoncé, lundi 4 novembre, des prévisions de trafic passagers en repli. Michael O’Leary, président-directeur général de la compagnie irlandaise à bas coût, dont la flotte est uniquement composée de Boeing 737, a déclaré que les retards de livraison lui feraient perdre 15 millions de passagers sur un an. Il faut dire que l’avionneur est à la peine. En septembre, il n’a livré que dix-huit 737 MAX. Il espère seulement en sortir trente-huit chaque mois, d’ici à la fin de 2024, encore bien loin des cinquante-neuf exemplaires d’avant la pandémie due au Covid-19.

Voir aussi

https://www.avweb.com/aviation-news/boeing-strike-over/?

https://www.flyingmag.com/aircraft/boeing-strike-ends-after-53-days/?

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