FFPLUM, lettre sécurité de mai 2015: Quand le moteur ne veut pas s'arrêter

(Par Thierry COUDERC, Président de la Commission Sécurité des Vols de la FFPLUM)
L’actualité des déclarations REX nous conduit à aborder un thème qui avait déjà été évoqué parmi d’autres points techniques dans la lettre de sécurité n°7 de septembre dernier. Le REX 6479 relatait le blocage d’un câble de manette des gaz qui restait coincé dans sa gaine faute d’entretien et interdisait au pilote de réduire la puissance.
Or depuis, ce ne sont pas moins de 3 nouveaux témoignages qui nous sont parvenus à propos de cas plus ou moins similaires, lesquels nous donnent l’occasion d’évoquer quelques situations classiques auxquelles le pilote peut être confronté dans cette famille d’incidents :
Rupture franche de la commande des gaz :
http://rex.isimedias.com/ffplum/COMPLET/REX_Visualisation.cfm?id=6566&ty=11
Dans le cas présent, il semble que l’extrémité du câble ait progressivement glissé sous la vis qui était censée la retenir en l’écrasant. Nous n’avons pas une description technique suffisamment détaillée du dédoubleur pour nous risquer à commenter les raisons de la survenue de l’événement. En revanche, les conséquences sont indiscutables : la commande part en buttée sous l’effet des ressorts de rappel des carburateurs. Dans le cas évoqué, le moteur est parti plein gaz, mais en fait, ce qui surviendra dépend de la configuration de la commande. Sur un moteur deux-temps classique avec une commande à boisseau vertical coulissant, les ressorts poussent dans le sens de la fermeture de sorte qu’une telle mésaventure provoquera plutôt le passage du moteur au ralenti.
NB: Sur le Pipistrel Sinus 912 la rupture du cable (ou son décrochage) entraîne un position « ralenti » ( un « REX » au sol).
Déréglage asymétrique entre les deux carburateurs :
http://rex.isimedias.com/ffplum/COMPLET/REX_Visualisation.cfm?id=6568&ty=11
Une grande part de notre parc d’ULM est équipée avec des moteurs à double carburateur. La bonne synchronisation de ces derniers est indispensable au fonctionnement harmonieux et sans excès de vibrations du moteur. C’est donc (ou devrait être) l’une des préoccupations récurrentes des pilotes. Mais si l’une des deux commandes de gaz fait défaut et pas l’autre, il n’est plus possible de maintenir cette synchronisation, et alors le REX ci-dessus décrit ce qui risque de survenir. En vol, le pilote confronté à une brusque altération du régime accompagnée de vibrations doit essayer de modifier les gaz pour voir s’il peut trouver un régime tolérable qui lui offrira un répit, à condition qu’il parvienne à le maintenir. Mais s’il ne trouve pas très rapidement dès la première manœuvre un réglage acceptable, il ne faut pas tergiverser et couper tout de suite le moteur. Ni son bâti ni la cellule n’accepteront longtemps ce genre de traitement sans défaillir. Et puis le phénomène peut avoir d’autres origines tout aussi destructrices à brève échéance, comme un problème d’hélice par exemple.
Tous ces cas de figure conduisent inévitablement le pilote à arrêter volontairement du moulin en vol à plus ou moins brève échéance et à procéder à un atterrissage moteur coupé. La simplicité de la technologie employée dans la commande des gaz et l’excellente fiabilité des câbles sous gaine dans cette fonction, font que ce type d’incident n’est pas vraiment courant. En revanche, l’exemple suivant est, quant à lui, plus fréquent.
Refus de coupure du ou des allumages :
http://rex.isimedias.com/ffplum/COMPLET/REX_Visualisation.cfm?id=6562&ty=11
La plupart de nos moteurs ne sont pas équipés d’étouffoir et leur arrêt se fait par coupure d’allumage. Cette dernière est provoquée par la mise à la masse de la ou des bobines, de sorte qu’un fil coupé, une cosse mal sertie, un interrupteur défectueux ou une prise mal emboîtée suffit à rendre inopérante la commande d’arrêt du moteur.
Dans ce cas, il existe peu ou pas de risque en vol. En revanche à l’atterrissage avec les ULM dont la procédure préconise de couper le moteur avant l’arrondi (paramoteurs) et pour tous lors des manœuvres au sol (ainsi qu’en cas de déploiement du parachute de secours), une telle anomalie peut provoquer des catastrophes. Lorsque le basculement des contacts ne provoque pas l’arrêt d’un moteur chaud, le meilleur moyen de le stopper rapidement sera de le noyer en tirant le starter et/ou en manœuvrant frénétiquement la poire d’amorçage s’il y en a une. En revanche, ne comptez pas sur le robinet d’essence qui n’est en aucun cas un moyen d’arrêt d’urgence. Il peut se passer une bonne minute entre sa manœuvre et l’extinction moteur, le temps de vider le contenu des tuyaux et des filtres.
Le suivi rigoureux de l’appareil et des visites pré vol sans impasse devraient nous épargner la majorité de ces désagréments. Comme pour les autres composants de l’ULM, une connaissance précise des organes du moteur et de leur fonctionnement, ainsi que des procédures décrites au manuel de vol, permettra chaque pilote à contrôler efficacement l’état de sa machine et l’aidera à analyser les situations atypiques afin de prendre les décisions appropriées.
ATTENTION ! Les moteurs à injection et ceux qui sont turbocompressés sont dotés de systèmes plus complexes et plus variés. Ils présentent des vulnérabilités spécifiques dont les symptômes et le traitement doivent être connus des pilotes qui les utilisent.