737 MAX et la FAA

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https://www.aeronewstv.com/fr/transport/surete-securite-aerienne/4434-boeing-doit-modifier-son-737-max-interdit-de-vol-en-europe.html

Extrait

Boeing a jusqu’à la fin du mois d’avril pour modifier le logiciel du système anti-décrochage (MCAS) qui équipe ses 737 MAX. C’est ce que vient de demander l’agence de sécurité aérienne américaine (FAA). Si rien n’indique pour l’instant que ce système soit à l’origine du crash du Boeing d’Ethiopian Airlines dimanche (157 victimes), il semble cependant qu’il ait joué un rôle dans l’accident de Lion Air (189 victimes) en octobre dernier. Boeing devra également actualiser les manuels de vol de l’avion et la formation des pilotes.

Source officielle : https://www.faa.gov/news/updates/?newsId=93206

et

https://www.faa.gov/news/updates/media/CAN_2019_03.pdf

Et aussi

https://investir.lesechos.fr/actions/actualites/usa-la-faa-n-immobilise-pas-le-boeing-737-max-dans-l-immediat-1833653.php

Voir aussi l’article paru dans le Monde du 14-03

AÉRONAUTIQUE
Boeing au chevet de son 737 MAX

Des 737 MAX d’American Airlines, à Miami, mardi 12 mars. JOE RAEDLE/AFP
Guy Dutheil
De nombreux pays ont fermé leur espace aérien à ce nouvel avion, essentiel dans la stratégie du groupe
C’est une véritable défiance internationale à l’encontre du 737 MAX. Les uns après les autres, Etats, compagnies aériennes et instances de l’aviation ont décidé d’immobiliser leur flotte du dernier-né des moyen-courriers de Boeing ou de lui interdire leur espace aérien. Ces mesures, qui constituent une manifestation de défiance inédite dans l’histoire de l’aviation civile, interviennent après le crash, dimanche 10 mars, d’un 737 MAX de la compagnie Ethiopian Airlines, qui a causé la mort des 157 passagers et membres d’équipage. Motif de l’inquiétude mondiale : il s’agit de la deuxième catastrophe d’un avion de ce type – un appareil de la compagnie indonésienne Lion Air s’est abîmé en mer, fin octobre 2018, tuant ses 189 passagers.

Près de cinq mois plus tard, les causes de cet accident n’ont toujours pas été établies. Il n’empêche, beaucoup notent les nombreuses similitudes entre les deux catastrophes. Flambant neufs, les deux appareils étaient en service depuis moins de trois mois, et à chaque fois, ils ont sombré peu après leur décollage. Dans l’attente des conclusions des enquêtes sur les deux crashs, l’avionneur américain indique qu’il « prend acte » des interdictions de vols de son nouvel appareil. Depuis son entrée en service en mai 2017, plus de 370 appareils de ce type ont été livrés en mai 2017, selon les décomptes de Boeing. Avant de connaître les conclusions de l’enquête sur la catastrophe en Ethiopie, l’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) a donc choisi de fermer l’espace aérien européen au 737 MAX, mardi 12 mars. Avant elle, la France et de nombreux pays avaient fait de même. « Compte tenu des circonstances de l’accident en Ethiopie, les autorités françaises ont pris la décision, à titre conservatoire, d’interdire tout vol commercial effectué sur un Boeing 737 MAX à destination, au départ ou survolant le territoire français », a indiqué, mardi, la Direction générale de l’aviation civile (DGAC).

Une nouvelle technologie

C’est la Chine, l’un des plus gros clients du nouveau moyen-courrier, qui a démarré cette cascade d’interdictions et d’immobilisations de l’avion. Lundi 11 mars, Pékin s’est résolu à clouer au sol les 96 exemplaires du 737 MAX en service dans les compagnies chinoises. Une décision qui pourrait ne pas être totalement dénuée d’arrière-pensées, alors que la Chine et les Etats-Unis se livrent une rude bataille commerciale.

Face à ce mouvement de défiance généralisée, la décision de l’Agence fédérale de l’aviation civile américaine (FAA) de ne pas prendre de mesures coercitives à l’encontre de l’avion étonne. Parmi les pilotes, nombreux sont ceux à ne pas comprendre pourquoi l’immobilisation totale des 737 MAX n’a pas été décidée. Philippe Evain, ancien président du Syndicat national des pilotes de ligne d’Air France, rappelle qu’en 2013 le 787 Dreamliner de Boeing avait été interdit de vol durant trois mois « pour des problèmes de batteries ». A l’en croire, les autorités de l’aviation « devraient avoir le courage d’arrêter les avions », « par mesure de précaution ».

Lundi, la FAA a toutefois enjoint à Boeing de procéder, « au plus tard en avril », a des modifications sur ces 737 MAX. L’Agence vise particulièrement le Maneuvering characteristics augmentation system. Une sorte de « calculateur », un système informatique de stabilisation censé empêcher les décrochages de l’appareil, indique un pilote d’Air France qui a volé auparavant sur des 737 de première génération. Une nouvelle technologie installée par Boeing sur les 737 MAX, « en raison, notamment, du nouveau design de l’appareil dont les moteurs sont placés plus en avant », ce qui modifie l’aérodynamique de l’avion, explique le pilote d’Air France.

Pour Boeing, les deux crashes risquent d’être lourds de conséquences. Le patron d’un grand équipementier pour l’aéronautique redoute que, « selon la profondeur du problème », la mise au point d’une solution technique « se compte en semaines, sinon en mois ». Selon lui, une fois que l’avionneur américain aura trouvé une parade aux « bugs » de certains des logiciels de son avion, celle-ci devra encore « être qualifiée, puis certifiée » par les différentes autorités de l’aviation civile. Pour ce grand patron, ces différentes étapes pourraient pénaliser l’avion pendant « au minimum un mois, voire de un à trois mois ». Ce scénario du pire pourrait coûter cher à Boeing, d’autant que la gamme des 737 MAX est clé dans sa stratégie commerciale : environ 5 000 avions de ce type ont été commandés dans le monde, et son succès doit permettre à l’américain de regagner des parts de marché sur Airbus, qui a pris deux ans d’avance sur le secteur des moyen-courriers de nouvelle génération. Outre le coût de la modification des logiciels de tous les appareils déjà en service, le constructeur de Seattle devrait dédommager les quarante-sept compagnies aériennes qui ont déjà été livrées en 737 MAX.

Airbus n’en profitera pas

L’affaire pourrait coûter au groupe entre 1 milliard et 5 milliards de dollars (entre 890 millions d’euros et 4,5 milliards d’euros), selon la société de conseils à Wall Street, Melius Research, si tous les 737 MAX étaient cloués au sol. En Bourse, l’action Boeing a de nouveau chuté mardi 12 mars. Sa baisse atteint 11,5 % depuis lundi matin.

Toutefois, Boeing, qui a réalisé un chiffre d’affaires record de 101 milliards de dollars en 2018 et 10,4 milliards de profits, pourrait profiter d’une sortie de crise moins douloureuse. Le groupe pourrait être autorisé à mettre au point un « interim fix ». Cette solution provisoire permettrait aux compagnies aériennes de poursuivre l’exploitation de leurs appareils autorisés à « voler en mode dégradé », signale le patron de l’équipementier. Le temps pour Boeing, ajoute-t-il, de parvenir à « la résolution finale du problème ».

Les difficultés du constructeur américain ne font pas le bonheur de son rival Airbus. Du côté de l’avionneur européen, on « refuse de se réjouir des malheurs de Boeing », notamment « quand la sécurité des passagers est en jeu », fait-on savoir. Airbus, qui détient déjà plus de 60 % de parts de marché des moyen-courriers de nouvelle génération avec sa famille des A320 NEO, n’a pas les moyens, à court terme, de chiper des clients à Boeing. L’avionneur de Toulouse a déjà fort à faire pour augmenter ses cadences de production. Il doit sortir de ses usines 63 appareils par mois. Sa chaîne de fournisseurs fonctionne, elle aussi, au maximum de ses capacités. Elle ne supporterait pas une nouvelle accélération du rythme.

Les déboires du 737 MAX pourraient-ils amener des futures compagnies clientes à revoir leurs commandes ? Air France-KLM, qui n’a pas de 747 MAX dans sa flotte, mais compte en commander, pourrait revoir sa stratégie. La compagnie franco-néerlandaise n’a pu finaliser, faute d’accord avec les syndicats de pilotes, sa commande de plusieurs dizaines de 737 MAX pour renouveler la flotte de 737 ancienne génération de sa filiale low cost Transavia.

Enfin, une immobilisation même prolongée du 737 MAX de Boeing ne devrait pas permettre l’émergence d’un nouveau concurrent. Notamment chinois. Le moyen-courrier C919 du chinois COMAC, pourtant plus rustique sur le plan technologique, est encore loin d’être au point.