Source: Le Monde
Le succès des vols low cost alourdit le bilan carbone de la France
Transavia, la compagnie à bas coûts d’Air France, est particulièrement mise en cause
Guy Dutheil
Plus il y a d’avions dans le ciel et plus ils détraquent le climat ! C’est le constat mis en évidence par une étude de l’ONG Transport & Environment (T&E) parue le 19 avril. En 2023, la vigoureuse reprise de l’activité du transport aérien a aussi eu comme conséquence une forte augmentation des émissions de CO2. Selon T&E, qui a analysé les vols au départ de la France, les principaux responsables de cette hausse de la pollution sont les compagnies à bas coût.
Au top 10 des compagnies les plus polluantes, établi par l’ONG, les low cost easyJet, Transavia et Ryanair occupent trois des quatre premières places du classement. Surtout, même si Air France occupe de loin la première place dans l’Hexagone, ce sont essentiellement les compagnies à bas coût (ainsi que Corsair), qui ont provoqué l’augmentation du CO₂ depuis les aéroports français. L’an passé, les vols au départ de l’Hexagone ont augmenté de 10 % par rapport à 2022 soit quelque 700 000 décollages. Dans le détail, les 2 000 départs quotidiens dénombrés en 2023 ont envoyé dans l’atmosphère quelque 20,3 millions de tonnes de CO₂, en hausse de 12,5 % par rapport à 2022.
A l’examen, relève T&E, les deux plus mauvaises élèves sont Transavia et Ryanair. « Transavia ou Ryanair ont largement dépassé leurs niveaux d’émissions de 2019 », signale l’ONG. Volotea, autre low cost, présente en France, ne pointe qu’à la dixième place, mais affiche aussi une forte hausse. En revanche, easyJet est la seule de la catégorie à présenter des émissions en baisse par rapport à l’avant-Covid-19.
Selon les chiffres de 2023, c’est Transavia, la filiale à bas coût d’Air France qui décroche la palme. Avec plus de 90,9 % de hausse, les émissions de CO2 de Transavia ont presque doublé par rapport à 2019, la dernière année avant la pandémie de Covid-19. Toutefois, ce mauvais résultat ne signifie pas que les avions de la low cost sont plus polluants que ceux des compagnies rivales. En fait, si Transavia a pollué presque deux fois plus c’est qu’en quatre ans, sa flotte a presque doublé de taille. Entre 2019 et 2023, elle est ainsi passée de 38 à 71 appareils.
Destinations moyen-courriers
Malgré cette croissance, se défend la filiale d’Air France, elle est encore loin de rivaliser avec Ryanair ou easyJet, les deux principales low cost en Europe. Quand Transavia vise une flotte composée d’une centaine d’avions à moyen terme, Ryanair ou easyJet opèrent déjà « entre 300 et plus de 500 appareils », se défend la filiale d’Air France. Surtout, la croissance de Transavia, s’est en partie effectuée aux dépens de celle d’Air France. Une part des destinations nouvelles opérées par Transavia l’étaient par sa maison mère. Cette dernière a d’ailleurs annoncé son départ d’Orly pour laisser toute la place à Transavia.
Il n’empêche, alors que les lignes long-courriers n’ont pas toutes été rouvertes, les destinations moyen-courriers sont en plein boom. « Le rebond de l’aérien est accaparé par les compagnies low cost, qui ont augmenté leurs nombres de vols de 13 % en 2023 », explique Jo Dardenne, directrice Aviation à T&E. Des pollueurs qui ne sont pas toujours les payeurs, dénonce d’ailleurs l’ONG. En 2023, Air France n’aurait ainsi payé « que 46 millions d’euros de taxe carbone, alors qu’elle aurait dû régler 700 millions d’euros si tous les vols au départ de l’Europe avaient été taxés », a calculé l’ONG.