« La Grande Guerre vue du ciel » sur ARTE, samedi 10-11 à 20:50

Extrait du journal Le Monde

La Grande Guerre vue du ciel

Une escadrille d’avions Farman. INDIGENES PRODUCTIONS
Alain Constant
Fabrice Hourlier propose une immersion au cœur des combats aériens durant le conflit mondial de 1914-1918
ARTE
SAMEDI 10 – 20 H 50
DOCU-FICTION
Fabrice Hourlier est un habitué des documentaires-fictions historiques de qualité. On se souvient notamment de deux programmes particulièrement réussis diffusés ces dernières années : l’un était consacré à la campagne d’Egypte de Bonaparte, l’autre à la retraite de Russie de Napoléon. Grâce à des procédés techniques comme la 3D, des scènes reconstituées plutôt bien jouées et une narration de qualité, le téléspectateur se voyait soudain plongé au cœur de l’action, que ce soit au pied des pyramides ou au bord de la Berezina. Côte à côte avec les mamelouks dans la chaleur égyptienne ou tremblant de froid avec les grognards de la vieille garde.

Cette fois, avec La Guerre des as, Hourlier propose un nouveau programme ambitieux dont le thème se prête parfaitement au spectacle télévisé. Cette immersion au cœur des combats aériens de la Grande Guerre vaut en effet le détour. Mais au-delà des spectaculaires scènes de chasse, de bombardement, de mitraillage ou de poursuite dans le ciel d’une France et d’une Belgique martyrisées, ce programme en deux parties vaut aussi pour les portraits plus intimes des personnages que le réalisateur a choisi de suivre tout au long de ce périple tumultueux.

Jalousie, orgueil, inconscience

Il faut dire que les as des as de l’époque, qu’ils soient français (Georges Guynemer, René Fonck), allemands (Manfred von Richthofen, Ernst Udet) ou anglais (Edward Mannock), furent des personnalités vénérées. Et que, au-delà des victoires accumulées (80 pour Richthofen, le « Baron rouge », 75 pour Fonck, 73 pour Mannock, 62 pour Udet), ces hommes ont vécu, au ciel et parfois sur terre, des aventures sortant de l’ordinaire. Guynemer, par exemple, qui forma un couple très glamour avec la jeune actrice Yvonne Printemps. Idole allemande, Richthofen sera abattu en avril 1918 à l’âge de 25 ans, quelques mois après le jeune Guynemer, lui aussi adulé par son peuple, mort au combat au-dessus de la Belgique en septembre 1917, à seulement 22 ans.

Autre élément qui rend ce programme si intéressant : les précieux témoignages de quatre experts et historiens spécialisés dans l’histoire militaire aérienne. Entre deux scènes de combat reconstituées ou d’archives d’époque, Claude Thollon-Pommerol, Bernard Marck, Norman Franks et Jörg Mückler expliquent en détail les avancées techniques d’une arme qui, au début de la guerre, est considérée avec méfiance par les états-majors. En 1914, on ne trouvait que 130 appareils en France. En 1918, l’armée française pourra compter sur 12 000 avions !

Car l’efficacité de ces machines volantes, qu’il s’agisse de Fokker, de Morane-Saulnier ou d’autres modèles, va se faire de plus en plus évidente au fil du conflit. Pour terminer en apothéose en mars 1918 près de la Somme, lors de la première gigantesque attaque aérienne de l’histoire militaire, surnommée la « charge des aviateurs » et menée avec brio par René Fonck, l’un des rares aviateurs vedettes à survivre au conflit.

Les historiens interrogés dans ce docu-fiction apportent également des informations concernant la personnalité de ces jeunes pilotes sortant de l’ordinaire. Jalousie, orgueil, inconscience, peur, cette plongée dans l’intime rend encore plus poignantes les aventures de ces as des as, venus de milieux sociaux très différents. De Guynemer le « Môme de fer » à Richthofen le « Baron rouge », cette saga aérienne se regarde avec intérêt et plaisir.

La Guerre des as, de Fabrice Hourlier (France 2017, 2 × 52 min).