La hausse de la taxe sur le transport aérien remboursée aux passagers
La démission du gouvernement a conduit les compagnies à rendre le surcroît qu’elles avaient collecté fin 2024 sur les billets de 2025
Guy Dutheil
Le vote de la motion de censure qui a provoqué la chute du gouvernement Barnier, mercredi 4 décembre, aura quand même fait quelques heureux : les passagers des compagnies aériennes. Ces derniers ont échappé, pour le moment, à l’augmentation de la taxe sur les billets d’avion (TSBA) décidée par l’exécutif pour combler, notamment, une partie du déficit budgétaire. Après s’être concertés, vendredi 6 décembre, les dirigeants des compagnies réunies au sein de la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (FNAM) ont préconisé de rembourser les milliers de passagers qui avaient déjà subi, par anticipation, l’augmentation de la TSBA applicable dès le 1er janvier 2025.
A l’origine, le gouvernement souhaitait un triplement de la TSBA pour collecter, en 2025, 1 milliard d’euros supplémentaires, dont 850 millions d’euros auprès des compagnies aériennes et 150 millions d’euros sur l’aviation d’affaires. A elle seule, Air France aurait dû régler plus de 280 millions d’euros par an. Peu ravies de cette ponction supplémentaire, les Air France, Air Caraïbes, Corsair et consorts avaient prévenu qu’elles feraient porter le poids de cette hausse sur les passagers. Notamment sur les billets achetés en avance pour des vols en 2025. La censure soudaine du gouvernement Barnier a pris les compagnies de court.
Dans l’incertitude, elles ont choisi « de rembourser et d’arrêter d’appliquer l’augmentation de la taxe », indique au Monde Pascal de Izaguirre, président de la FNAM. Sans attendre, Air Caraïbes et French Bee ont ainsi décidé la « suspension immédiate de la collecte de l’augmentation de la TSBA »dès vendredi, a indiqué Christine Ourmières-Widener, présidente des deux compagnies aériennes du groupe Dubreuil. Pour avoir prélevé la taxe du 31 octobre jusqu’au 6 décembre, c’est environ 1 million d’euros qui devra être remboursé aux passagers d’Air Caraïbes et de French Bee. Pour ceux-ci, la hausse avait été d’environ 7 euros par billet.
Quelques effets néfastes
Disparue avec la censure, l’augmentation de la taxe sera sans doute de retour avec le prochain gouvernement. Une période de flottement qui agace les compagnies aériennes. Il y a désormais « trop d’incertitudes », pointe le président de la FNAM. Le patron du syndicat ne sait pas « quel sera le niveau de la TSBA » que le prochain gouvernement fixera. « Nous ne pouvons pas attendre ! Il n’y a pas de premier ministre, pas de gouvernement et nous allons repartir dans une discussion budgétaire », qui risque de durer, se désole M. de Izaguirre. On ne devrait pas voir d’augmentation de la taxe avant plusieurs semaines. « Il n’y a aucune chance pour ce soit le 1er janvier, sauf surprise », ajoute-t-il. Mme Ourmières-Widener redoute, elle, que la taxe soit « remise sur la table de façon rétroactive » par l’Etat. « Ou alors qu’il décide une mise en place immédiate », précise-t-elle.
Disparue prématurément, la hausse de la TSBA a quand même eu le temps de provoquer, en à peine quelques semaines d’existence, quelques effets néfastes pour les compagnies. « Nous avons pu constater une certaine inflexion de la demande pour les vols transatlantiques de French Bee », reconnaît la dirigeante. A l’examen, l’augmentation d’une vingtaine d’euros pour les vols entre Paris et New York a refroidi les ardeurs d’un certain nombre de passagers de la classe économique. Il faut dire que « l’élasticité des tarifs est plus faible en classe économique, qu’en première ou en classe affaires », explique Mme Ourmières-Widener. Elle souhaite que cet entre-deux soit le plus bref possible car « c’est une histoire perturbante pour nos clients comme pour nos employés », se désole-t-elle.
Gagnantes avec la disparition momentanée de l’augmentation de la TSBA, les compagnies aériennes devront se passer, au moins un temps, de la mise en place d’un crédit d’impôt pour leur approvisionnement en carburants durables. Attendue dès le 1er janvier 2025, cette mesure aurait pu représenter jusqu’à 50 millions d’euros pour le groupe Air France. « On ne peut pas gagner sur tous les tableaux ! », atteste, fataliste, M. de Izaguirre.
Source: Le Monde